ASIE DU SUD-EST
téléchargement.jpeg

Eau, jasmin et pétales de rose

En Asie, la saison des pluies est l’occasion de festivités libératrices durant lesquelles on honore l’eau et sa promesse de renouveau.

En Asie du Sud-Est on dit en plaisantant qu’il y a deux saisons: la saison chaude et la saison très chaude. Les températures oscillent en effet entre 26 et 35 degrés de novembre à mars puis s’élèvent graduellement pour dépasser les 40 degrés en avril. Lorsque la chaleur, combinée à un fort taux d’humidité atteint les limites du supportable, la pluie arrive enfin et les températures redescendent lentement. Il pleut alors sans discontinuer, parfois pendant des semaines, jusqu’à la fin octobre moment où le temps devient sec à nouveau. Les températures remontent alors et le cycle recommence.

 

C’est lorsque la chaleur est à son point le plus intense à la mi-avril, qu’a lieu le grand festival de l’eau, appelé Songkrhan en Thaïlande, célébré également en Birmanie et au Laos.

 

Cette période coïncide avec le nouvel an bouddhiste et pendant 3 jours, de grandes fêtes sont célébrées dans tout le pays qui consistent simplement à s’asperger d’eau. On sort les bidons, les pistolets à eau, les tuyaux d’arrosage, les lances à incendie même!  pour s’asperger mutuellement dans les rues en une  célébration joyeuse, désordonnée et euphorique. Personne ne ressort indemne ! L’espièglerie est de mise, il s’agit de surprendre ses amis, sa famille mais aussi ses collègues de travail, son patron même, au moment où ils s’y attendent le moins et leur balancer un seau d’eau pour les tremper de la tête au pied. Cela donne lieu à des courses poursuites des fous rires et, alors que les rues fument de chaleur, c’est un rafraîchissement bienvenu et un prétexte à tous les débordements.

 

A cette occasion, de nombreux thaïlandais bouddhistes se rendent dans les temples afin de faire des offrandes et recevoir les bénédictions des moines avant de retourner chez eux pour retrouver leur famille. Il est de coutume, dans un geste de révérence et de gratitude, de laver les mains des aînés avec de l’eau parfumée aux pétales de rose et au jasmin. La croyance veut que l'eau éloigne la malchance et purifie. Les asiatiques prennent cette croyance au sens littéral et les grandes batailles d’eau qui ont lieu dans le pays ont aussi pour fonction de renouveler et purifier les gens, les bêtes, les habitations, et les objets, qu’il s’agisse d’une statue de Bouddha ou de son scooter. 

 

Depuis toujours, l’eau est un élément riche de symbolique, universellement lié à la naissance et à la régénération. Sa pureté et sa transparence estompent les souillures c’est l’élément de purification et de protection par excellence, commun à toutes les religions et partie intégrante de nombreux rituels de par le monde. L’eau est également l’élément guérisseur par excellence, que ce soit de l’eau bénite par des moines ou de l’eau provenant de sources pures, comme le Ganges en Inde, le grand fleuve sacré dans lequel les hindous vont se baigner pour se purifier.

 

Les batailles d’eau d’avril, qui accueillent la saison des pluies, sont le pendant d’une autre célébration importante qui a lieu le soir de la pleine lune de  novembre et indique officiellement la fin de la saison des pluies. Il s’agit de Loy Krathong, une fête que l’on retrouve dans tous les pays d’Asie. Elle consiste à  honorer et remercier les divinités des eaux pour leurs bienfaits. Les habitants se réunissent aux abords des lacs, des rivières et de l’océan et honore les vertus de l’eau  par des offrandes sous forme de panier végétal flottant richement décorés de fleurs, d’encens et de bougies. On remercie pour les bienfaits reçus et on laisse symboliquement l’eau emporter toutes les colères, les haines et autres pensées négatives accumulées durant l’année.

 

Au Vietnam par exemple, on fabrique de petites barques en bois sur lesquels on place un bâton d’encens et une bougie qui symbolise ses espoirs, ses rêves de ses vœux qu’on laisse ensuite filer sur l’eau. En Thaïlande, la tradition est de fabriquer la plus jolie offrande de fleurs, souvent de magnifiques  pièces montées florales tout en finesse et en délicatesse, qui sont ensuite offertes à l’océan. On organise même des concours pour la plus belle pièce montée. On y pose consciemment toutes les choses lourdes dont on souhaite se débarrasser, les événements difficiles, les peines et les chagrins que l’on a traversé pendant l’année écoulée, toutes les rancœurs et les animosités que l’on a pu éprouver. Il n’est pas rare d’y laisser un objet qui représente ce dont on souhaite se débarrasser, puis on laisse le pouvoir de l’eau les emporter et les dissoudre, pour recommencer à neuf.

 

Une jolie tradition qui vous inspirera peut-être à créer votre propre rituel dans notre beau pays de lacs et de rivières.

 

   

virginie claret