NOUVELLE-ZÉLANDE

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MAORIS: LA FORCE DE L’IDENTITÉ

Mana, le coeur spirituel de la culture polynésienne, a permis aux natifs de Nouvelle-Zélande de résister aux aléas de l’histoire.

Grands navigateurs, les polynésiens ont peuplé les îles de l’immense et sauvage océan pacifique, de Hawaii à la Nouvelle-Zélande, en passant par Tahiti, Tonga, Samoa, Cook et l’île de Pâques. Les mythes maoris racontent que leurs ancêtres partirent d’une terre appelée Hawaiki et furent guidé jusqu’à la Nouvelle-Zélande par les étoiles et les courants.  

Les polynésiens, qui ne connaissaient pas l’écriture, ont toujours utilisé le tatouage pour décliner leur identité. Ceux-ci couvrent le corps et constituent un récit, où l’on peut lire la généalogie d’une personne, son rôle dans la société, ses qualités et les événements de sa vie. Traditionnellement, le côté gauche indique la généalogie paternelle, le côté droit, la lignée maternelle. Le tatouages évoluent avec le temps, selon les évènements personnels et les distinctions sociales que l’on acquiert. 

L’esthétisme est important, ils doivent mettre le corps en valeur et les polynésiens maîtrisent cet art à la perfection: les lignes épousent la forme du corps, et suivent les contours des muscles en un entrelacs de lignes et de motifs stylisés. On y retrouve des symboles inspirés du monde végétal et marin, vagues et fougères, symbole de vie, dents de requin, signe de protection et de force, Tikis, les protecteurs spirituels, ou encore la tortue, pour l’harmonie et la famille. En Nouvelle-Zélande, les maoris ont le moko, l’impressionnant tatouage facial. 

Les tatouages débutent à la puberté et constituent un véritable rite de passage. Cérémonie sacrée, on s’y prépare par le jeûne et un rituel de purification. Toute la communauté y participe avec des chants traditionnels. Les tatouages en effet, sont intimement liés à la notion de mana, un mot mystérieux, au coeur de la culture polynésienne. 

Mana est l’énergie sacrée qui imprègne tout ce qui est vivant. Un lieu, une rivière, une montagne, peuvent avoir du mana, un objet également, et c’est aussi ce qui va déterminer la force de caractère d’un homme ou d’une femme. Si le mana est particulièrement intense, le lieu ou l’objet devient tapu (d’où vient le mot tabou), c’est-à-dire sacré. De la quantité de mana d’un individu dépendra son prestige et son influence au sein de la tribu. Un mana fort se réfère à un chef, une personne reconnue pour son autorité naturelle et ses qualités de leadership. Le tatouage alimente le mana. Se faire tatouer c’est revendiquer ses origines et tirer jusqu’à soi la force contenue dans la lignée de ses ancêtres. Mana est la force spirituelle qui anime celui qui sait de qui il vient et d’où il vient. 

Cette loyauté envers le passé, la fierté qui en découle, fait la force de la culture maori en Nouvelle-Zélande. C’est ce qui a permis, outre les grandes qualités guerrières de ce peuple, de lutter contre les colons anglais, de garder ses traditions et, au final, à les imposer comme une composante indissociable de la culture néo-zélandaise. 

Décrits par les premiers colons comme des  guerriers féroces et fiers, les Maoris ont toujours été redoutés par les anglais qui investissent l’île au XIXme siècle. Vaincus, ils ont été soumis à l’exclusion, la pauvreté, la violence et la drogue. Il fallut attendre les années 70 pour qu’un fort mouvement de renaissance  culturelle voit le jour durant lequel les maoris revendiquent leurs droits, luttent contre la confiscation de leurs terres et l’annihilation de leur langue. 

Aujourd’hui, l’enseignement de la langue maori est courant, les motifs traditionnels décorent les bâtiments publics et les protocoles maoris sont intégrés aux cérémonies du gouvernement. Leur lutte pour l’environnement, la nature tenant une place prépondérante dans leur mode de vie et leur spiritualité, contribue à valoriser l’image de la Nouvelle-Zélande comme celle d’un pays soucieux de l’écologie. 

Le fameux haka, la danse guerrière maori qui fait la renommée de l’équipe de rugby des All Black est devenu un symbole national. Plus que tout autre aspect de la culture maori, le haka exprime à lui seul l’âme des guerriers maoris, la passion, la force et l’identité d’un peuple. Il est enseigné dans les écoles. Au final aujourd’hui, les valeurs et la culture maori sont acceptées, revendiquées même, par les non-maoris de Nouvelle -Zélande et contribuent à unifier une société d’une grande diversité culturelle, peuplée d’ immigrants blancs, asiatiques, et polynésiens. 

« Si ton mana est testé, tu dois être préparé. Personne n’a le droit de te dire que tu n’es pas important. Il faut un mana fort pour affronter les vicissitudes de l’existence, et la vie en tant que maori n’est pas facile. L’histoire nous a tissé ensemble, les blancs et les maoris, comme les fibres d’un même panier.  Il s’agit de se regarder les yeux dans les yeux, d’égal à égal, et d’exercer une pression constante sans jamais perdre ni le respect de soi ni le respect de l’autre. Nous sommes ici, « ajoute encore le chef maori James Iti, ceci ne peut pas être changé et doit être compris et respecté pour que la nation évolue vers l’unité ». 

Des paroles fortes alors que l’hydre du racisme agite à nouveau nos sociétés.  

virginie claret